Un dîner d'affaires ... diplomatique

Le véhicule diplomatique pryan chargé de ramener Duvalon se gara dans le jardin de l'ambassade. Arthur descendit du véhicule et alla rejoindre Marc Tiverre, Ambassadeur de Prya en Fantispa.

- Monsieur l'Ambassadeur, bien le bonjour.

Les premiers convives commençaient à arriver à l'ambassade. Le repas promettait d'être tendu mais Marc avait bon espoir qu'il soit fructueux et mette un terme au différend naissant entre le Groupe Duvalon et les autorités fantispaises.

"Monsieur de Fortia, Monsieur Duvalon,

Je vous remercie d'avoir fait le déplacement, notamment depuis Prya. J'ai cru comprendre que le taulier avait été de sorti pour l'occasion, j'espère que la traversée s'est bien passée.

Je vous invite à passer dans le petit salon de l'ambassade avec moi en attendant l'arrivée de notre dernier convive, après quoi nous pourrons passer à table."

- L'usage d'un avion de la République aurait été maladroit, même si ma venue ici concerne, selon moi, d'avantage Prya que mes propres intérêts. Mais j'apprécie toujours une sortie sur le Taulier. C'est toujours un bon moment pour lever un peu le pied, se relaxer, bronzer en dégustant quelques vodkokos bien frais avec quelques brochettes de poulpes....Quoique, nous avons croisé beaucoup de bâtiments de guerre, particulièrement à notre arrivée dans le détroit de Sorlop. Je dois dire que cela gâche un peu le paysage...Ces grands navires gris et polluants...On est loin de la carte postale et de son lagon bleu. M'enfin, à part cela, c'est toujours un grand bonheur que de naviguer.

C'est la première fois que je viens à l'ambassade, quel bel endroit. Monsieur Defortia, je suis ravi de vous voir ici. Les équipes de football cartonnent chez vous! La LPF est très heureuse de l'engagement des clubs fantispais. Nous allons sous peu annoncer de très bonnes nouvelles pour le football pryan et international....La semaine prochaine si tout va bien.

C'est une bonne nouvelle ça alors. Effectivement, le football fantispais a toujours été un levier sportif de la Principauté malgré l'absence de structure pour avoir une compétition nationale.

Monsieur Tiverre, qui est le dernier convive?

Les équipes fantispaises seront toujours les bienvenues dans les compétitions pryannes et la LNP considère Prya et Fantispa comme un unique territoire de football.

Tout se passait bien pour l'instant. Il faut dire que le dernier convive n'était pas encore arrivé, et l'humeur générale risquait de dépendre en partie de la sienne.

- Nous attendons encore Monsieur Ruffin. Celui-ci ne devrait plus trop tarder. En attendant, souhaitez-vous quelque chose à boire, Messieurs ?

Tiverre, fidèle à ses habitudes, commanda un pression krasslandaise. La tentation était trop grande, peu importe le lieu et l'occasion.

- Je vois que vous ne perdez pas votre temps pour parler des sujets qui fâchent, ironisa Marc. J'ai toujours en travers de la gorge ma dernière défaite ... Mais il est vrai que les résultats des clubs fantispais sont tout bonnement incroyables. J'aurais cru que les équipes krasslandaises allaient rapidement truster les premières places. Tant mieux pour le spectacle et pour le sport !

Je boirais bien une Spéciale pimentée.

ET ce n'est que le début, le développement envisagé par les propriétaires laissent envisager un avenir encore plus radieux. 
Puis se tournant vers Duvalon. 
Il faudra peut-être envisager une règle d'équité financière peut-être. Et j'ai bien dit équité et non pas égalité. Dans le style, budget à fournir pour la saison à venir.

Duvalon se tournant vers le louffiat banganais de service :

- Je prendrais un vieil Armarac (/EL Ouais elle vient de me venir celle là...EL/)

Duvalon ne se doutait pas de la présence de Ruffin au dîner de l'ambassadeur Tiverre. Il réfléchit un instant, et se dit qu'un bon repas et quelques bonnes bouteilles aident toujours à détendre l'atmosphère.

- La LPF a effectivement pensé aux éventuelles dérives financières que pourraient engendrer le foot business. Pour le moment, aucune règle n'est envisagée et il est certains qu'une hiérarchie fondée sur les moyens financiers se mettra en place. Ce serait naif de ne pas le croire. Mais c'est aussi ce dont nous avons besoin pour offrir du spectacle aux supporters. Je pense que la LPF sera très vigilente quand à l'origine des moyens financiers injectés dans ce sport......Et...Monsieur Tiverre...Il ne fait pas sous-estimer les krasslandais.

Même s'il passait très peu de temps au Krassland, Arthur était krasslandais. Et il était particulièrement attaché aux résultats des clubs de sa deuxième patrie.

- Je pense que les clubs krasslandais manquent encore un peu de soutien de la part de leur pays. C'est une sorte d'échauffement. Les krasslandais sont très intelligents. Je vois cette première compétition comme une sorte de round d'observation pour eux. Je crois qu'ils ont encore bien des choses à nous montrer sur les terrains de football.

Il est certain que le prochain mercato risque d'être beaucoup plus agité. Surtout, si une structure pour gérer les compétitions est mise en place.

"Nul doute que les krasslandais ne se contenteront pas longtemps de ces résultats. Je les sais préoccupés par d'autres sujets en ce moment. Ils sortent tout juste de longues élections, semble-t-il. Mais je profite d'être pour l'heure devant eux pour me pavaner un peu, l'euphorie risquant d'être de très courte durée."

Professionnalisation des clubs, dotation, réglementation ... Le sujet était vague. Tiverre savait parfaitement ne pas pouvoir lutter à armes égales contre des multinationales telles que le Groupe Duvalon ou Fivendi Universal. Sans règlement strict et rigoureux, l'avenir du sport était promis à des joutes inégales tous les weekend.

"Sans doute est-ce par faute de moyens de ma part, mais je pense nécessaire de réglementer strictement les apports de sociétés, liées ou non, dans les clubs de football. L'équité sportive doit demeurer et ce notamment si l'on espère voir de nouvelles nations s'intéresser à ce sport et s'y investir pleinement."

- Réglementer oui, imposer non. Et ne vous en faites pas, la LPF evoluera progressivement. Rien n'est gravé dans le marbre et si des erreurs sont commises, nous pourrons toujours faire marche arrière.

Je ne m'en fais pas, de toute façon Fivendi Universal possède deux équipes et ne pourra donc pas engager des moyens illimités dans deux équipes. Par contre le Prince lui aura moins de difficultés avec l'AP Sorlop.

Heureusement, le football est un sport et la vérité d'un sport n'est pas toujours celle de l'argent. Dites moi, Ruffin se fait désirer ou suis-je trop impatient?

Il est vrai que Tod commençait à se faire un peu désirer. Son emploi du temps de ministre ne devait toutefois pas lui laisser beaucoup de répit. Aussi fallait-il par conséquent ne pas trop se montrer impatient.

- Il faut dire, Arthur, qu'il est plus simple pour nous de dégager du temps sachant que plus rien ne se fait à Prya depuis un mois. Je suis certain que Monsieur Ruffin ne tardera pas trop. Il ne manquerait pas une occasion de revenir dans cette ambassade qui, je le sais, lui tient particulièrement à coeur.

Après quelques renseignements venant d'Eva, Tod comprit que Marc avait oublié de lui préciser deux-trois choses. Cela confirmait ses inquiétudes. Il avait malgré tout fini par donné son accord et il se rendrait donc à l'ambassade. Après tout, ses seuls objectifs durant ce dîner étaient de retrouver un lieu emblématique de son parcours, de revoir Julio en dehors du Conseil des Ministres et croiser à nouveau Marc qu'il appréciait.

Néanmoins, de nombreuses affaires exigeaient sa présence. Et même avec lui, ces affaires n'avançaient pas assez vite à son goût. Il arriva très en retard, mais ne s'inquiéta pas. Il arriva dans le petit salon. Son regard se promenait de temps en temps sur un meuble, un endroit. Tout lui rappelait des souvenirs. C'était notamment pour ça qu'il était là !

- Messieurs, bonsoir. Je suis en retard. J'en suis désolé. Des affaires que je ne pouvais ignorer. Julio, toujours aussi élégant ma parole ! Marc, tout va bien ?

Une voix venant de derrière annonça l'arrivée de Tod. Plus personne n'était attendu et le dîner allait pouvoir commencer, sans plus tarder.

- Quand on parle du loup ! Ne vous excusez pas Tod, nous avons eu l'occasion de discuter du football en attendant votre arrivée et de la structuration du championnat. Voulez-vous quelque chose à boire avant que nous ne passions à table ?

Le dîner ne pouvait être que mouvementé et tumultueux. Tod avait, semble-t-il, volontairement ignoré Arthur. Ce froid ne pouvait toutefois perdurer éternellement ... Il espérait que les deux soient en mesure de mettre de côté leur aigreur et leur rancoeur du moment. Heureusement que Juilio avait accepté l'invitation et avait pu se libérer.

- Après cette longue journée de travail, je prendrai bien une Spéciale s'il vous plait. J'aime parfois en déguster après le travail, mais jamais pendant.

Tous les convives ayant été sévis, Tiverre leur proposa de passer à table. Une petite table avait été aménagée dans un salon privé de l'ambassade, assurant une parfaite tranquillité et une grande discrétion au repas du soir. Cela avait été mis en avant par l'ambassadeur afin de convaincre ses convives du soir de faire le déplacement.

"Messieurs, je vous suis profondément reconnaissant d'avoir accepté cette invitation, laquelle détonne un peu et nous change à n'en pas douter de nos quotidiens respectifs."

Les verres des convives furent remplis avec un peu d'Ydel, cette boisson particulièrement appréciée à Prya.

"Aussi et étant parfaitement conscient de vos emplois du temps chargés, je vais me permettre après cette douce discussion sur le football de rentrer dans le vif du sujet sans plus tarder. Comme vous le savez pertinemment, les échanges entre nos deux nations sont plus forts et plus denses que jamais. Toutefois, au regard du traité commercial qui unit nos deux nations, j'ai été alerté par certains juristes, notamment de MicroJuris, que votre nouvelle législation, ambitieuse et avant-gardiste, en matière économique pouvait constituer un violation du traité commercial unissant nos deux nations."

Marc prit une gorgée. Il guettait Tod du coin l'oeil, scrutant chacune de ses réactions. Il savait pertinemment que cette discussion ne serait pas de son goût. Toutefois, elle était aux yeux de l'ambassadeur indispensable.

"En vous en parlant dans ce cadre et ce contexte, je cherche avant-tout à éviter toute mauvaise presse dont nos deux Etats pourraient pâtir, vous le comprendrez. J'espère ainsi que nous pourrons évoquer ce sujet ainsi qu'un éventuel renforcement de ce traité commercial. Les relations entre Prya et Fantispa sont, je le doris, respectivement importantes et fondamentales pour chacun d'entre nous. Renforcer les accords qui nous lient serait ainsi un signe envoyé aux différentes populations"

Pourriez-vous me dire quel point du traité en particulier serait violé?

Marc desserra le noeud de sa cravate et pris une nouvelle gorgée de vin. Il n'était pas à l'aise dans cet exercice, mais il ne pouvait toutefois échapper à ses responsabilités.

"Eh bien, d'après certains juristes, en imposant un prix plancher pour l'achat de stocks et en interdisant dans le même temps à une entreprise pryanne de participer directement à des appels d'offres, la Principauté n'ouvrirait pas réellement ses marchés à la République de Prya, contrairement aux dispositions de l'article 101 du traité unissant nos parties."

Marc demanda à un employé de l'ambassade à ce que quelques fenêtres soient ouvertes. Il avait chaud. Des vraies remontées de chaleur. Du genre désagréables et prenantes.

"Bien entendu ... Cette ... Cette interprétation n'est qu ... qu'une inter ... préta ... tion, Monsieur de Fortia. Par... Pardonnez-moi".

Le burn-out pryan dans toute sa splendeur. Une journée de travail et paf le malaise. Marc s'empressa de quitter la table qu'il venait pourtant de rejoindre avec ses convives. Il prit la direction de la sortie et s'allongea sur les quelques marches devant l'ambassade, respirant à plein poumons. Une tête qui tournait, des palpitations ... puis plus rien pendant quelques secondes. Ou quelques minutes.

Duvalon sourit en observant la scène. 

- Veuillez m'excuser un instant

Il sortit sur le péron de l'ambassade et allongea quelques baffes peu appuyées afin que Tiverre reprenne ses esprits.

- Ben alors Tiverre, on craque?