- Voilà, c’est ici !
Le grand bonhomme longiligne habillé d’un pull-over rouge à carreaux jaunes de mauvais goûts ouvra la porte qui donnait sur une minuscule chambre. Celle-ci était habitée par un lit dont le temps et les pensionnaires avaient fini par faire gondoler. Une table et un petit meuble compétait le mobilier. Un tableau – qui représentait un paysage verdoyant sans grand intérêt – était le seul élément de décoration et était censé donné un peu d’humanité à l’endroit. Une porte sur le côté gauche indiquait la présence d’une selle de bain qui devait probablement afficher la même vétusté. Les murs décrépits, le sol de béton fissuré et l’ampoule qui pendouillait du plafond avaient dû en démoraliser plus d’un.
Ce foyer d’immigrés avait fait son temps, c’était une certitude. D’autres établissement devaient sans nul doute être dans un meilleur état, mais la malchance avait voulu que Tod et sa petite famille se voient attribuer cette chambre-là.
- Ca doit être une erreur, on devait nous amener dans un foyer d’immigré, pas dans un taudis.
- Vous êtes bien dans un foyer. Mais si vous préférez dormir à la belle étoile, il ne tient qu’é vous de sortir de ce « taudis. »
- Mais, vous plais… commença Tod et fut interrompu promptement par Becky.
- Ca ira, on prend ! Il ne s’agit que d’une solution provisoire.
Le géant pinça ses deux lèvres et mitrailla Tod d’un regard de défiance. Après un silence et alors que le sapin de Noël allait partir, Tod ne résista pas à réagir.
- De toute manière, j’ai toujours rêvé de vivre comme un bohémien. Rassurez-moi, nous ne disposons pas de commodité au moins ? Ni de douche ? Je ne voudrais pas chercher un emploi en ayant le derrière propre.
- Tod ! Arrête !
- Est-ce que Môsieur aurait un souci d’ordre « je suis un emmerdeur » ?
- Non, j’ai plutôt un souci d’ordre « faut pas prendre pour un charl… »
Doucement, le bonhomme s’approcha avec le même regard que celui d’un boxeur qui rentre sur un ring et qui est décidé à en découdre. La mâchoire et les poings serrés, Il se plaça face à Tod. Ce dernier se décomposa.
- Je crois finalement que ça va être le bonheur. Assurément.
- Mouais. Va falloir. J’sais les mater les chercheurs de poux.
Après avoir soupiré fortement, le géant sortit sans un mot.
- Imbécile !
- Tu sais très bien que c’est seulement provisoire.
- Je suis sûr qu’il a fait exprès de nous donner sa chambre la plus pourri.
- Qu’est-ce que tu racontes ? Occupe-toi donc plutôt d’Auguste.
- Je ne peux pas, j’ai autre chose à faire. Il faut que je plonge le bout de mon nez dans l’étude de toutes ces lois.
- Je vois. C’est bien reparti !
- C’est bien ce que tu voulais ?!
- Je m’occupe d’Auguste.
- Papa, lâcha l’enfant.
- Non, maman ! rectifia Tod. C’est maman qui va s’occuper de toi.
- Papa ! Papa !
- Maman, ma-man.
- Papa !
- Maaaaa-maaan
- Paaapaa !
- Je crois que l’étude de ces lois vont devoir attendre…
- Manquait plus que ça ! Heureusement qu’on a laissé le clébard à ma mère.
- Heeuuu… à ce propos Tod…
- Quoi ?
- Ta mère va venir nous rendre visite dès que nous serons installés pour nous amener Sharkie.
- Ah non ! Ah, non, non et non. Moi qui croyait qu’on s’en était débarrassé.
- Elle… passerait quelques jours à Fantispa…
- Je l’imagine bien. Elle ne va pas fairel l’aller-retour.
- … quelques jours chez nous…
- Alors là, c’est le bouquet final. Vous organisez tout cela dans mon dos, sans me consulter ?
- Tu étais préoccupé.
- Mouais. Mais dis-moi, elle ne viendra que quand nous serons installés ?
- Oui. On ne peut l’accueillir ici.
- Et bien finalement, je crois que je vais vite me faire à cette foutue chambre…