Annonce du Mariage du Prince Zygmunt 1er de Fantispa

Je vous remercie de vos cadeaux.

Prince Zygmunt 1er de Fantispa

Altesse,

Je suis honoré que mon présent ait pu Vous plaire, mais je suis également profondément navré que Dame de Habsbovrg Votre fiancée n'ait pu recevoir et donner son propre avis quant à mon présent.

Respectueusement,

Ce jour du huit Février de l'an mil sept cent sept, la Chancellerie de Sa Majesté, sise en le Palais Castillon, en face de l'autre partie du Palais Impérial, dénommée Palais Aragon, était en émoi. Il n'était plus question de la multitude de fonctionnaires s'agitant à travers tout l'édifice, du hall fastueux, au parterre de marbre blanc, et au plafond où étaient accrochés solidement plusieurs lustres, illuminant le luxe des ébénisteries où s'affairaient les huissiers en service, jusqu'aux sombres et obscurs couloirs des recoins de la bâtisse, tels que la Bibliothèque Impériale, d'où partait, disait-on, de nombreux souterrains vers le Palais Aragon ; mais il s'agissait aujourd'hui de la venue de l'éminent Prince de Fantispa, qui allait prendre pour épouse une parente de l'Empereur. Il avait été convenu, selon les ordres du Chancelier en personne, qu'il fallait éblouir le Prince, et le convaincre du prestige de la nation avaroise, au travers de ce qui constituait le centre décisionnel du Saint-Empire. Ainsi, l'on avait fait circuler maintes notes de service, afin que chaque fonctionnaire pût prendre connaissance de l'organisation de cette journée particulière, et du protocole opérationnel que l'on avait instauré. De cette manière, le Prince Zygmunt ne devait pas être opportuné par les allées et venues des coursiers, ne devait pas se sentir rabaissé à la foule qui agitait jour et nuit le Palais.
Dix heures quarante-cinq minutes sonnaient à la cloche de la Chapelle Impériale. Sur le perron se trouvaient déjà le Sieur Constantin Malherbes, Chambellan de Sa Majesté, chargé de représenter la Couronne en cet évènement important. Les derniers calèches s'arrêtaient sur la place, et ne tardaient pas à repartir, empruntant une direction dérobée, qui contournait le Palais. La Deuxième Compagnie de la Garde Impériale, dite de Sainte-Espan, priait les gens qui se trouvaient dans la cour de disposer rapidement, afin que le cortège ne soit point retardé. En effet, à la Chancellerie, tout avait été décidé à la minute, et aucun retard ne pourrait être toléré. Le grondement des roues des carosses de la délégation résonnait, et l'on les vit passer au loin l'entrée de l'immense propriété, située en plein centre de la Capitale.
Le mariage, initialement prévu à la Basilique Saint-Landry, comme l'exigeait le Protocole pour de pareilles personnalités, avait une première fois été modifié, en raison du culte du Prince, qui obéissait au dogme alhamique, et non à l'Eglise Zorthodoxe. Mais le Dauphin, d'un commun accord avec le Prince, avait décidé au dernier moment de modifier les modalités de l'union matrimoniale. Aussi celle-ci allait-elle se dérouler au Palais Castillon, devant les institutions temporelles uniquement.
Cinq carosses, frappés des armes fantispaises, s'arrêtèrent au-devant du Palais Castillon, et les gardes placés aux quatre coins de celui du Prince, reconnaissable par ses décorations dorées rocailleuses, s'empressèrent d'ouvrir les portes à leur Souverain. Le Prince Zygmunt Ier, de la Maison de Garenio, descendit alors, rayonnant de fraîcheur et de jeunesse, et lança un premier regard vers le grand édifice qui s'élevait devant sa majesté. Le Chambellan vint à sa rencontre, et fit une profonde révérence.
"Vostre Altesse, av nom de la Covronne et de Son Altesse Sérénissime le Davphin, Régent dv Saint-Empire Avarois, novs Vovs sovhaitons la bienvenve av Palais Impérial."
Le Prince, en retour, daigna porter l'attention à ce sieur, accompagné de diverses personnes, et lui rendit l'intelligence d'une brève inclinaison du chef.
"Si Vostre Altesse vevt bien me svivre, je La condvirai près Son Excellence le Chancelier, afin qve débvte la cérémonie."
Zygmunt, qui arborait une perruque d'un blanc farineux, surmontée d'un chapeau à larges bords, accompagné d'une plume rouge, acquiesça et le groupe se mit en marche vers les grandes huisseries de la Chancellerie, qui, paraissait-il, n'étaient jamais refermées, afin que ne fluctue point la libre circulation des gens et des marchandises. A peine avait-on franchi le seuil de la pièce marbrée que les derniers fonctionnaires se tassaient dans les recoins de la salle, afin de ne pas gêner l'évolution du monarque, vêtu d'un habit de grand apparat, d'où pendaient moultes décorations, dont la rarissime écharpe de commandant suprême d'ordres, quels qu'ils fussent. L'on monta avec cérémonie et solennellité les marches du grand escalier, où se reflettait la lumière des cierges, qui seuls, même en plein jour, pouvaient éclairer les moindres recoins de l'immense hall. Tout en haut du monument venait d'arriver le Marquis de Vignecourt, et ce fut non sans quelque remord que celui-ci salua le Prince, contraint à ce que son interlocuteur ne se fût déplacé pour venir à sa rencontre. Les huissiers, dans le hall, avaient déjà repris leur harassant travail, et ce fut partout sur le parcours du Prince que les moindres affaires, si urgentes et importaient étaient-elles, étaient suspendues, et que le personnel disparaissait, le temps d'un moment, fort éphémère. Au bout d'un ultime couloir, aux parois d'argent et d'or, s'imposaient deux battants, clos. Le Chancelier mit le Prince au courant :
"Voici, Vostre Altesse. De l'avstre costé de ces hvisseries se trouve la grande salle de la Chancellerie, vsée généralement lors dv seing des Souverains svr les docvments officiels. Elle constitve donc vn endroit très solennel, parfaitement adéqvat povr l'vnion qve Vovs prévoyez de contracter. Lorsqve Novs arriverons devant les battants, les hvissiers Vovs annonceront ; Vovs entrerez alors le premier, et monterez les qvelqves marches Vovs séparant de l'avtel placé av fond. A mon tovr, je Vovs svivrai, et me placerez par derrière ce dernier. La Dame de Habsbovrg fera alors Son entrée, et se placera à Vostre gavche. Vovs Vovs salverez alors ; et l'office débvtera.
- Novs vovs remercions de ces précisions, Excellence, répondit le Prince, qui parlait un assez bon avarois.
- Il ne favdrait que Vostre Altesse se retrouve av dépovrvu."
Et ce fut chose faite. La Cour, composée essentiellement de nobles avarois, mais aussi d'aristocrates fantispais, venus en hâte, libéra la travée centrale, et dès l'annonce du Prince faite, fit de larges révérences et de déférentes courbettes à son passage. Témoins de la rareté de telles unions, l'on avait, peut-être malencontrueusement, disposé les drapeaux des deux Etats derrière l'officiant ; et à défaut de croix trinitaire et autre instrument religieux, un grand livre, pareil aux immenses registres empoussiérés de la réserve de la Chancellerie, trônait sur l'autel, et laissait entrevoir la tranche de ses pages dorées à l'or fin.
"Madame la Comtesse de Vendosme."
Le Prince se retourna, et vit le visage de sa future épouse, saluée par l'assistance, qui le regardait d'un air profond. La Dame, habillée et maquillée telle une précieuse, paraissait frêle et douce ; mais savait porter dans sa démarche la majesté que se devaient d'avoir les membres de la famille impériale, quelle qu'en fût la branche. Arrivée à hauteur du Prince, les deux protagonistes se saluèrent de façon très protocolaire, et se tournèrent ensuite vers le Chancelier, qui prit un long parchemin, qu'il déplia lentement.

"Av nom de Sa Majesté Impériale Edovard Ier, Emperevr d'Avaricvm, Prince-Exarqve de Castillon, Son Altesse Sérénissime Léto-Victorien de Valois-Castillon, Davphin d'Avaricvm, Prince Héritier de Castillon, Régent dv Saint-Empire Avarois, représentée en présence dv chef dv Gouvernement de Sa Majesté Son Père, l'Excellent Chancelier Nicolas Jean-de-Diev Sauvetovt d'Orgeailles, Marqvis de Vignecovrt, et par les Grands Officiers de la Maison de Sa Majesté, notamment Son Chambellan, le Sievr Constantin Malherbes,

& Son Altesse Princière Zygmvnt Ier, Prince Titvlaire de Fantispa,

Sovcievx d'assvrer l'harmonie de Levrs pevples, et par là-mesme de pérenniser levrs relations,
Conscients des liens historiqves les vnissant,
Désirevx de renforcer levrs relations politiqves et diplomatiqves, nécessaires à tovte avstre coopération,
Ont convenv ce qvi svit :

Mesvrant pleinement les menaces qvi peuvent planer sur Levrs intérests respectifs, est institvée l'Alliance avaro-fantispaise, vnion militaire et diplomatiqve. Le Saint-Empire Avarois et la Principavté de Fantispa resteront vnies devant l’adversité et se presteront vne assistance mvtvelle en tovte circonstance.

Afin de garantir cet engagement solennel, Son Altesse Sérénissime le Régent a consenti à l'vnion de Son Altesse le Prince de Fantispa et de la Dame Marie-Madeleine de Habsbovrg, Comtesse de Vendosme, en tant qve membre de la branche seconde de la famille impériale."

Le Chancelier reposa alors son parchemin ; et en prit un second, qui paraissait plus concis. A peine allait-il faire jouer son éloquence, que les grandes portes, précédemment refermées, s'ouvrirent à nouveau ; et après un long moment d'hésitation, l'on se décida à annoncer le Dauphin. Le jeune homme entra dans la pièce, comme s'il eut appris tout récemment que l'union avait lieu. Il avait débarqué précipitamment, et le Prince de Fantispa s'était retourné, étonné. Léto-Victorien s'approcha de son homologue, alors que la Cour le saluait comme nul autre.
"Pardonnez ceste intrvsion, Altesse, mais il ne convenait poinct de Nostre part qve la cérémonie se déroulast sans Nostre présence, reqvise povr la ratification de l'Alliance, et fort honorable povr l'événement présent, si important av regard de Vostre souveraine personne... Reprenez, Novs vovs prions, Excellence."
Le Dauphin, accompagné de la Princesse Impériale, sa sœur, Amaranthe-Kaïlea de Valois, Duchesse de Belfort, vint aux premières places, et la cérémonie se termina, sous son œil attentif. L'on était assurément très étonné de cette intervention du Régent ; l'annonce de la Chancellerie affirmait pourtant que seul le Chambellan représenterait la Couronne, et que le Régent ne se déplacerait pas, aussi proche soit-il du lieu de la cérémonie. L'Alliance, dont nul nruit ne courait à ce propos, avait là aussi surpris, et l'on l'apprit seulement lorsque le Chancelier avait lu la déclaration bilatérale.
Vint ensuite le moment du seing de l'acte d'union matrimoniale. Les deux Souverains apposèrent leurs majestueuses signatures, magnifiques de complexité ; et l'on y déposa par la suite le cachet de leurs armes, usant de la très protégée presse de la Chancellerie, avec laquelle le Marquis de Vignecourt scellait les actes solennels du Monarque.
Juste avant de conclure, le Dauphin fit signe à un huissier qui se tenait non loin de s'approcher. Ce dernier proclama :
"Son Altesse Sérénissime le Davphin, Régent dv Saint-Empire Avarois, Commandevr Svpresme des Ordres Nationavx, considérant la prépondérance de la diplomatie fantispaise par delà les terres dv Micromonde, considérant l'alliance vnissant les Maisons de Habsbovrg et de Garenio, a décidé ce jovr d'octroyer à Son Altesse le Prince Titvlaire de Fantispa la dignité de Commandevr de l'Ordre de la Grenade, récompensant les svjets ayant porté havtes les covlevrs de l'Empire, et les souverains et dignitaires étrangers ayant acqvis la confiance de l'Emperevr."
Le Dauphin, suite à cette brillante annonce, se fit porter l'insigne, qu'il eut le plaisir d'accrocher sur la riche veste du Prince. Les deux Altesses se saluèrent alors ; et les deux époux suivirent leur hôte, afin de participer au déjeuner d'Etat donné au Palais Aragon.